mercredi 10 août 2011

Les démons de Mi-Ange

J'ai la chance de connaître Pierre Pelot, auteur vosgien mais que toute la France et le monde francophone devrait connaître. Mais j'aime aussi le lire et ma PAL compte quelques-uns de ses romans (vu qu'il en compte près de 200 à son actif, il me faudra encore un peu de temps pour tout lire...). Une récente discussion à son sujet sur le forum de Livraddict (en fait, il était question de la sortie d'une nouvelle édition de Conan le Barbare et, pour faire le malin, je suis allé chercher la couverture de Konnar le Barbant, oeuvre immortelle de Pierre, pour dire que je préférais ce livre-là...) m'a donné envie de lire un de ses romans noirs des années 80.

On connaît de cette période "l'été en pente douce", adapté au cinéma avec Jacques Villeret, Jean-Pierre Bacri et Pauline Lafont. Mais, dans la même veine, Pelot a écrit plusieurs romans assez court mais très denses, très sombres, d'une écriture concise et tranchante qui ajoute au malaise du lecteur.

C'est le cas de "le méchant qui danse", publié en 1985 et réédité en poche chez Rivages en 2000 (version toujours disponible).




Un village au fond d'une vallée vosgienne. En ce début septembre, la fête foraine s'est installée au village, l'ambiance est joyeuse. Mais, dans son atelier de menuisier, Jocco ne fait pas la fête. Il travaille avec son père et un ami. Quand, brutalement, il s'effondre. La marque sanglante sur son front ne laisse aucun doute : il a été atteint mortellement par une balle, tirée de l'extérieur.

On imagine le choc des témoins, mais celle qui réagit le plus brutalement, c'est la femme de Jocco, Marie-Ange, que tout le monde appelle Mi-Ange. Aussitôt informée de la mort de son époux, Mi-Ange sait. Sait que l'heure d'une atroce vengeance est venue. Une vengeance qui la vise elle, personnellement. Une vengeance venue tout droit de son passé, quand elle appartenait à une famille au nom plus qu'évocateur : les Malheur.

Alors, Mi-Ange ne fait ni une, ni deux. Bien qu'enceinte de 7 mois, elle prend une arme, saute dans sa voiture et s'en va à toute vitesse à quelques dizaines de kilomètres de là, à Remiremont, régler ses comptes une bonne fois pour toutes.

Derrière elle, ses 3 enfants, Col, Fany et Tony, vont chacun à leur tour entrer dans la danse, conscients du drame qui approche inexorablement. L'un veut l'empêcher, les autres y prendre part. Personne ne sera déçu du voyage...

Impossible d'en dire plus, mais "le méchant qui danse", c'est l'effet papillon vu par Pelot. Un effet ressenti seulement dans le département des Vosges, si cher à l'auteur (quoi que, quelquefois, on se le demande, tant il les malmène, ses Vosges, dans ses livres), qui commence par un papillon en forme de balle de fusil mais qui va se concrétiser effectivement par une sacrée tempête.

Le récit est ramassé, ultra-tendu, mené à un train d'enfer sur 240 pages. L'écriture est vive, incisive, violente et malmène le lecteur, le secoue. Les personnages sont brossés à grand coups de pinceau, leurs attitudes décrites comme par un entomologiste, leur caractère, souvent terne, taiseux, lâche...

Au milieu, Mi-Ange est un volcan, une source de vie, l'homologue vosgienne d'Elle, le personnage central de "l'été meurtrier", de Sébastien Japrisot. Comme Elle, Mi-Ange a une mauvaise réputation et ne fait rien pour que ça s'arrange. Très jeune, elle a aimé les hommes et ne s'en est jamais caché. Mais cela lui a coûté cher, très cher, une entrée forcée dans le clan Malheur, dont elle n'est sortie qu'en agissant de façon radicale.

La mort de Jocco, c'est le tribut qu'elle devait payer un jour à cette famille de malheur, sans mauvais jeu de mots. Mais c'est aussi l'occasion d'en finir une bonne fois pour toutes avec ces tordus, coûte que coûte.

Maîtresse femme, Mi-Ange n'a certes pas froid aux yeux. Mais sa colère l'aveugle, lui fait perdre la raison, agir sans discernement, dans la précipitation.

Sa vendetta ne peut que l'entraîner au fond d'un gouffre sans fond. Saura-t-elle faire cesser la danse du méchant ?

Le drame va crescendo, jusqu'à un dénouement final qui m'a laissé assis, pantelant, essoufflé, effaré...

Pelot est un maître pour beaucoup d'auteurs de SF, qui ont grandi en lisant ses livres dans les années 70, mais, Pelot est aussi un maître du roman noir. Un auteur à découvrir AB-SO-LU-MENT, je vous dis !

2 commentaires:

  1. Hum tu m'as donné envie de le lire !!
    Je l'ajoute direct dans ma wish...et bientôt dans ma pal j'espère !!
    Bonne fin de journée.

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  2. Je sais, que selon l'auteur, ça doit être un super livre. En plus, Remiremont se prête bien au décor pour une ambiance glauque. J'ai hâte de le lire, et pense encombrer mon appart des 199 autres. Il me reste juste une bonne âme prête à me les "prêter" :).
    MMA/GTD

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